samedi 29 décembre 2012

A propos du massacre de Newton,

peut-être avez-vous eu une pensée à Mickael Moore, dont le "Bowling for Columbine" pointait cette spécificité américaine du surarmement privé. Hé bien, cet étasunien atypique a réagi. La lettre qui suit cherche à retrouver les causes de ce syndrome national. Les raisons qu'il pointe ne suffisent pas seules à expliquer la dangerosité du pays, c'est l'addition de ces symptômes qui en fait un mélange détonnant. Dans tous les cas, ce texte aux accents chomskystes (dénonçant le côté terroriste de la politique internationale des US) a le mérite de faire réfléchir le lecteur. Parions que peu de membres de la NRA auront pris le temps d'aller jusqu'au bout...

"Après avoir regardé vendredi dernier la conférence de presse de la NRA, trompeuse et franchement dingue, il m’est apparu évident que la prophétie des Mayas s’était réalisée. A ceci près que le seul monde qui ait disparu était celui de la NRA. Son pouvoir brutal visant à déterminer la politique des armes dans notre pays, c’est terminé. Notre nation a été écœurée par le massacre du Connecticut.
Ces tueries ne vont pas cesser d’ici demain. Désolé de le dire. Mais au fond de nous-même, nous savons que c’est ainsi. Ce qui ne veut pas dire qu’il faille cesser de lutter. Après tout, l’élan est de notre côté. Je sais bien que, moi y compris, nous aimerions tous voir le président et le Congrès voter des lois plus restrictives. Une interdiction des armes automatiques ET semi automatiques est nécessaire. Ainsi que celle de chargeurs comptant plus de sept balles. Il nous faut davantage de contrôles, d’examens de santé. Nous devons également pouvoir réglementer la vente des munitions.
Mais, mes amis, autant ce que je viens de suggérer contribuera à faire baisser le nombre de morts par balles (demandez au maire de New York, cette ville où il est pratiquement impossible de s’acheter une arme de poing : le nombre de meurtres par année est tombé de 2200 à moins de 400), autant cela ne mettra pas un terme aux tueries collectives et ne résoudra pas les problèmes fondamentaux qui nous font face. Le Connecticut avait l’un des arsenaux législatifs les plus contraignants en la matière.
Cela n’a pas empêché l’assassinat de vingt enfants en bas âge ce 14 décembre.
Concernant Newton, soyons clairs : le tueur avait un casier judiciaire vierge et n’avait jamais été référencé chez un marchand d’armes. Toutes les armes qu’il a utilisées avaient été achetées légalement. Le tueur avait certainement des problèmes psychiques, sa mère avait tenté de l’aider, mais sans résultat. Concernant les mesures de sécurité, l’école de Sandy Hook avait été fermée à double tour AVANT l’arrivée du tueur ce matin-là. Des exercices de simulation avaient eu lieu pour prévenir un tel épisode.
Il y a un petit point bien embêtant que nous les progressistes ne voulons pas aborder : le tueur ne mit un terme à son massacre que quand il vit les flics grouillant dans l’enceinte de l’école, donc quand il perçut des hommes armés. C’est alors qu’il arrêta le massacre et se supprima ; ces officiers de police en armes empêchèrent 20, 40 ou 100 morts. Parfois, les flingues, ça marche. Cela dit, il y avait un shérif adjoint à Columbine le jour du massacre et il ne put rien empêcher.
Je suis navré de soumettre ces éléments dans notre combat pour un changement radical de la législation sur les armes, une nouvelle législation nécessaire mais plutôt cosmétique.
Nos dirigeants approuvent et perpétuent des actions violentes à des fins la plupart du temps immorales. Nous envahissons des pays qui ne nous ont pas attaqués. Nous utilisons régulièrement des drones dans une demi douzaine de pays, en tuant souvent des civils. Pas vraiment de quoi être surpris puisque notre nation est née d’un génocide et qu’elle a été construite grâce à la sueur des esclaves. La Guerre de Sécession a fait 620 00 morts parmi nous. Nous avons « apprivoisé » le Far West avec le pistolet à six coups ; nous avons violé, battu et tué nos femmes, sans merci, à un rythme sidérant : toutes les trois heures une femme est assassinée aux États-Unis, une fois sur deux par son compagnon ou par un ex ; une femme est violée toutes les trois minutes dans notre pays ; une femme est battue toutes les quinze secondes.
Notre pays appartient à ce groupe illustre de nations (Corée du Nord, Arabie Séoudite, Chine, Iran) qui applique toujours la peine de mort. Nous n’avons que faire des dizaines de milliers de nos concitoyens qui meurent chaque année parce qu’ils n’ont pas de couverture sociale ou parce qu’ils n’ont pas accès à un médecin.
Pourquoi faisons-nous cela ? Une réponse simple est : parce qu’on le peut. Chez nous qui sommes aussi des gens animés de sentiments amicaux, il y a un degré d’arrogance qui nous pousse à croire bêtement qu’il y a quelque chose d’exceptionnel en nous qui nous différencie des « autres » pays. Il y a beaucoup de bonnes choses chez nous ; il en va de même en Belgique, en Nouvelle Zélande, en France, en Allemagne etc.
Nous pensons que nous sommes n° 1 dans tous les domaines alors que nos étudiants sont les 17e en sciences, les 25e en mathématiques et que notre espérance de vie est la 35e au monde. Nous croyons que nous sommes la plus grande démocratie de la planète alors que notre taux de participation aux élections est le plus bas de toutes les démocraties occidentales. Nous sommes les plus forts et les meilleurs dans tous les domaines et nous exigeons et prenons tout ce que nous voulons.
Parfois, nous devons nous conduire comme des f** de p** pour obtenir tout cela. Mais si l’un de nous pète les plombs et révèle la nature totalement psychotique et les conséquences brutales de notre violence à Newton, à Aurora ou à Virginia Tech, alors nous sommes « tristes », « nos sentiments vont aux familles des victimes » tandis que nos présidents promettent « des mesures significatives ». Peut-être que le président actuel est sincère cette fois. Il vaudrait mieux. Des millions de personnes en colère ne vont pas lâcher le morceau.
Je demande respectueusement que nous nous arrêtions un instant pour réfléchir à ce qui me semble être les trois circonstances atténuantes qui peuvent nous aider à comprendre pourquoi les Américains sont le peuple le plus violent de la terre :
1) LA PAUVRETE
S’il y a une chose qui nous différencie du reste du monde développé, c’est que 50 millions de nos concitoyens vivent dans la pauvreté. Un Étatsunien sur cinq souffre de la faim au moins une fois par an. La majorité de ceux qui ne sont pas pauvres n’ont plus rien à la fin du mois. A l’évidence, ceci engendre de plus en plus de comportements délictueux. Les emplois du type de ceux de la classe moyenne préviennent le crime et la violence. Si vous ne croyez pas à cela, posez vous simplement la question suivante : si mon voisin a un vrai boulot et gagne 50 000 dollars par an, y a-t-il un risque qu’il pénètre chez moi par effraction, qu’il me tue et embarque ma télé ? Bien sûr que non.
2) LA PEUR, LE RACISME
Nous sommes un peuple extrêmement peureux, si l’on veut bien considérer que, contrairement à la plupart des nations, nous n’avons jamais été envahis (non, 1812 ne fut pas une invasion, c’est nous qui avons commencé). Pourquoi diable avons-nous besoin de 300 millions d’armes chez nous ? Je comprends que les Russes puissent avoir un peu les jetons puisque 20 millions d’entre eux sont morts pendant le Deuxième Guerre mondiale. Mais quelle est notre excuse ? A-t-on peur que les Indiens qui travaillent dans les casinos reprennent le sentier de la guerre ? On a peur que les Canadiens rachètent trop de cafétérias Tim Horton des deux côtes de la frontière ?
Non. La raison est que trop de Blancs ont peur des Noirs. Un point c’est tout. La grande majorité des armes sont achetées par des Blancs qui vivent dans les banlieues résidentielles ou à la campagne. Quand nous fantasmons que nous allons être victimes d’une agression ou d’un bris de clôture, quelle image de l’agresseur construisons-nous dans nos têtes ? Le môme à tache de rousseurs de la maison d’à côté ou quelqu’un qui, s’il n’est pas noir, est à tout le moins pauvre ?
Il serait bon de a) faire de notre mieux pour éradiquer la pauvreté et reconstruire la classe moyenne d’antan, et b) d’arrêter de promouvoir l’image du Noir croquemitaine qui sort de chez lui pour nous taper dessus. Calmez-vous les Blancs et débarrassez-vous de vos flingues.
3) LA SOCIETE DU « MOI-JE »
C’est cette éthique du chacun pour soi qui nous a mis dans une telle panade, et là est notre délitement. Je me débrouille par mes propres moyens ! C’est pas votre problème ! C’est le mien !
Assurément, nous ne sommes plus les gardiens de nos frères et de nos sœurs. Vous tombez malade et vous ne pouvez pas payer l’opération ? Pas mon problème. La banque a saisi votre maison ? Pas mon problème. Vous ne pouvez pas aller en fac ? Pas mon problème.
Et pourtant, un jour ou l’autre, cela devient notre problème, n’est-ce pas ? Enlevez trop de filets de protection et tout le monde finit par en ressentir l’effet. Vous voulez vivre dans ce type de société, une société où vous aurez à bon droit raison d’avoir peur ? Je ne le crois pas.
Je ne dis pas qu’ailleurs ce soit parfait, mais j’ai constaté, au cours de mes voyages, que d’autres pays civilisés estiment que s’occuper de tous et de chacun bénéficie à l’ensemble du pays. Des soins gratuits, des droits universitaires gratuits ou peu élevés, une assistance aux malades mentaux. Et je me pose la question : pourquoi nous, ne pouvons-nous pas réaliser cela ? Parce que dans de nombreux autres pays les gens ne se perçoivent pas comme des entités individuelles et solitaires mais comme les membres d’un groupe, sur le chemin de la vie, chacun existant comme la partie d’un tout. On aide les nécessiteux, on ne les punit pas parce qu’ils ont joui de malchance ou parce qu’ils sont dans une mauvaise passe.
J’en viens à croire que la raison pour laquelle les meurtres par balles dans les autres pays sont si rares est que leurs citoyens ne sont pas affligés de la mentalité du loup solitaire. La plupart ont reçu durant leur éducation le sens du lien, voire d’une solidarité totale. Difficile alors de se tuer les uns les autres.
Voilà quelques réflexions avant de partir en vacances. N’oubliez pas de saluer votre beauf’ de droite pour moi. Même lui vous dira que si vous n’êtes pas capable de gauler un daim en trois balles, et que vous estimez qu’il vous en faut trente, vous n’êtes pas un vrai chasseur, mon pote, et vous n’avez aucun droit à posséder une arme.
Michael Moore"

http://www.legrandsoir.info/pourquoi-tue-t-on-aux-etats-unis-beaucoup-plus-qu-ailleurs.html



vendredi 28 décembre 2012

Par contre,

j'ai beaucoup ri à ça.
























A la douce folie des personnages de la famille s'oppose le vrai délire sinistre américain du milieu des nymphettes de concours de beauté. Et il y a une morale toute pimpante : là, sous le tas de névroses traînées par toute cette bande de déprimés congénitaux palpite encore, on ne s'en rend compte qu'à la fin, le bon sens et la joie de vivre. Jubilationnel.


Evidemment, un sons et lumières,

en photo, c'est plutôt "plate", comme il disent dans l'outre de l'Atlantique.
En plus, sans pied pour stabiliser l'appareil, sous la pluie, avec des gens qui s'abritaient agglomérativement sous des parapluies, ça pouvait pas être grandiose.



























































Rennes, façade de l'hôtel de ville, de 18H00 à 23H00, jusqu'à la terminaison des fêtes.

Scary















Parfois dans un film,

on se demande s'il n'y a pas un bug dans le scénario, quand, après une heure, tout ce qui faisait l'intrigue est dénoué : le vilain est mort, les sbires du vilain sont arrêtés et confondus, le héros est libre et fume une cibiche à la gare, avant de quitter la ville. C'est exactement ce qui se passe dans ce film des débuts de Stanley Kubrick. On se dit que ce n'est pas possible, ça ne va pas pouvoir rebondir, et finalement, on a raison, le film ne dure que 1H05 !
Si je voudrais faire semblant que j'y connais, je dirais que c'est radicalement hitchcockien, comme film. D'abord, ils s'observent à travers les fenêtres d'appartements voisins, les miroirs ont une grande importance dans la construction des images, et puis, quand ils se battent dans l'entrepôt de mannequins, c'est très trhillique comme ambiance. Sur l'affiche, on voit les mains qui pendent, dans le film, elles bougent, pour faire peur, mais moi, je crains rien, j'ai mon doudou !





Message personnel

Si vous n'êtes pas la personne concernée, veuillez ne pas le lire, c'est indiscret !



















Commentaire là.

En plus, il est nul ce scrab', le y, il vaut que 4 points !

Au pays du tout-blanc, un qui fait (involontairement ?) de l'humour noir

"Ce drame suscite toujours une très vive émotion parmi les employés de Gourette, pour lesquels une cellule de soutien psychologique, mise en place samedi, est encore active. « Nous sommes bouleversés par cet accident et nous attendons les résultats de l'enquête. Il semblerait que les opérations d'embarquement se soient déroulées normalement. Je n'exclus aucune piste et je fais confiance à mon personnel, qui est formé et sensibilisé aux risques », témoigne le directeur de la station, Gérard Bracali."

http://www.sudouest.fr/2012/12/28/gourette-la-famille-du-jeune-skieur-porte-plainte-920157-7.php#xtor=EPR-260-[Newsletter]-20121228-[zone_info]

 Ce qui est logique, finalement pour un directeur de station.

Ceci résonne avec cela

De la condition des amérindiens du Canada d'aujourd'hui.

















Theresa Spence
Crédit photo : Sean Kirkpatrick, PC

http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2012/12/28/au-canada-le-soutien-a-la-chef-amerindienne-en-greve-de-la-faim-s-etend_1811058_3222.html#xtor=RSS-3208

...qui ramène à cela :




















http://ecoutesiilpleut.blogspot.fr/2012/11/voeux-de-prompt-retablissement.html

jeudi 27 décembre 2012

Dites oui


Une fois n'est pas coutume,

j'ai lu un article dans Paris-Match. Non, cela ne concernait pas une princesse surprise en train de se gratter sous le monokini, c'était un petit truc biographique d'une page sur Monsieur de Saint-Simon. Pas le noble courtisan surveilleur de "l'étiquette" à la cour ensoleillée, non, mais son lointain arrière-petit-descendant, philosophe, entrepreneur, aventurier, homme politique d'à cheval sur la fin XVIIIème et le début XIXème.

Vous voudrez donc bien distinguer à l'avenir (mieux que moi) :

Louis de Rouvroy, duc de Saint-Simon
Louis de Rouvroy, duc de Saint-Simon, né à Paris le 16 janvier 1675 et mort le 2 mars 1755, est un membre de la noblesse française, célèbre pour ses Mémoires qui racontent par le menu la vie à la Cour aux temps du roi Louis XIV et de la Régence. Wikipedia



















et

Claude Henri de Rouvroy, comte de Saint Simon
Claude Henri de Rouvroy, comte de Saint Simon, né à Paris le 17 octobre 1760 et mort le 19 mai 1825, est un économiste et philosophe français, fondateur du saint-simonisme. Wikipedia




















Wikipédia m'a rafraîchi la mémoire, mais j'avoue que j'ai très peu appris ou lu sur ce type et sa doctrine, le saint-simonisme. Pourtant fort intéressante, à vue de nez. Un brin utopiste (elle a séduit Proudhon et Fourier), avec des vrais morceaux de féminisme dedans, des préoccupations sociales en tas, mais avec une constante scientiste qui lui faisait envisager d'emblée différentes classes dans la société...
J'ai demandé à la FNAC à Rennes s'il y avait des biographies disponibles, et oui, à côté de tas de trucs épuisés, il devrait pouvoir s'en trouver une, mais ils l'avaient pas. Je cherche.

Donc, ce livre italien, là...

...s'appelle "La taverne du doge Loredan". Alberto Ongaro, l'auteur est un farceur inventif. Cet italien est un auteur très italien. Je ne sais pas dire pourquoi, mais c'est molto transalpinement vrai. Le récit est une succession de mises en abîme, d'allers-et-retours entre un passé qui ressemble au XVIIIème et l'évocation d'un narrateur-lecteur au présent qui se situerait dans la première moitié du XXème, d'apparition de personnages qu'on invente pour la bonne tenue du conte, en prenant le lecteur à témoin. C'est succulicieux. L'action se déroule un peu à Londres et beaucoup à Venise.
C'est l'histoire d'un livre trouvé par hasard sur une armoire, et dont le premier personnage central nous fait la lecture. Il y a donc d'emblée deux fils narratifs. Mais bientôt, de petits détails du livre étonnent le lecteur Schultz : on dirait que ça parle de sa propre vie...

Si vous n'avez rien compris à ces quelques lignes, c'est normal, c'est très subtilement confusionnant.
























Merci P. A. pour cette suggestion et ce prêt dont à propos que je n'ai qu'un regret : il va falloir que je te le rende...
Paru en 2007 en français, traduction de Jacqueline Malherbe-Galy et Jean-Luc Nardone

"L'air qu'ils boivent ferait éclater vos poumons"*

Le temps des grands espaces est revenu...


*Les oiseaux de passage, Jean RICHEPIN

mercredi 26 décembre 2012

The fall, Trélissac


"Madame, de toute ma vie


jamais je n'ai accompli à l'égard d'une femme un seul geste qui ne fût, même secrètement, désiré par elle. Plaise au ciel que je ne me sois pas trompé cette fois et justement avec vous, la femme dont je ne sais pas si je l'aime plus ou si je la désire plus. Vous m'attendiez, n'est-ce pas ? Dites-moi que vous m'attendiez. Dites-moi que dans peu de temps nous nous coucherons l'un près de l'autre sur votre lit nus et heureux ou bien je me jette sous vos yeux par cette fenêtre par laquelle je viens d'entrer...
                    Nous sommes au rez-de-chaussée, tu l'as oublié ? Disait-elle.
                    Non, je m'en souviens fort bien. Et c'est l'unique raison qui m'inciterait à me jeter. Ce n'est pas que je m'aime moi-même aussi profondément, mais je me considère comme votre propriété et j'ai le plus grand respect pour tout ce qui vous appartient."


Extrait du roman « La T. du D. L. »,   de l'auteur italien A. O.

Qu'on me laisse le temps d'achever cette lecture recommandable, et je me ferai un plaisir de dévoiler qui et ce qui se cache derrière ces initiales...

lundi 24 décembre 2012

Descente chez les muses

J'ai ressenti l'effluve, l'haleine soufrée,
Les vapeurs acides
Qui pénètrent tout
Jusqu'au fond des terreurs
Il faudra tout brûler
En habitué des lieux, je serai attendu
Et on me montrera mais si sereinement
D'un doigt qui montre à peine
La sente qui serpente
Et se vrille, éperdue
Couverte de brandons
Qui brûleront tes pieds
Tu montes chez les filles
Dont les lèvres entrouvertes
Ces royales pimbêches !
Exsudent en filets
Coulant aux commissures
Nectar et cyanure
Le verbe que je lèche

dimanche 23 décembre 2012

Vive la lecture ! (Fin)

Il n'aura pas échappé aux plus attentifs et aux plus assidus des lecteurs de ces pages que chaque mois depuis janvier de cette année parait une petite série de photos de lectrices délurées ou adeptes des tenues à moindre coût, exceptionnellement de lecteurs dans le même état d'esprit. Voici donc la douzième et ultime de l'année, cette fois pour montrer que parmi les activités humaines qui se peuvent pratiquer collectivement avec bonheur s'immisce sans aucun doute la lecture.

Pour les grands.

Kerity, la maison des contes

Synopsis :
Natanaël a bientôt 7 ans mais il ne sait toujours pas lire… Lorsque sa tante Eléonore lui lègue sa bibliothèque contenant des centaines de livres, Natanaël est très déçu ! Pourtant chacun de ces contes va livrer un merveilleux secret : à la nuit tombée les petits héros, la délicieuse Alice, la méchante fée Carabosse, le terrible capitaine Crochet, sortent des livres… Ils doivent prévenir Natanaël qu’ils courent un grand danger et risquent de disparaître à jamais. Pour sauver ses minuscules amis et leurs histoires, Natanaël, rétréci par la Fée Carabosse, se lance dans l’aventure ! Il affrontera vaillamment le très fourbe Ramastou, les crabes géants, l’Ogre affamé… Arrivera-t-il à temps à lire la formule magique qui les sauvera tous ? Ce n’est pas parce que c’est inventé que ça n’existe pas !








Un truc vraiment réussi, à mettre dans toutes les prunelles, une alternative aux moments perdus devant les chaines de télé pour les gosses, d'une sombre nullité...




Rendez-vous le 27 janvier,

à Paris.

http://www.rue89.com/2012/12/16/la-grande-manif-du-mariage-pour-tous-avec-les-reporters-de-rue89-237855














Crédit photo : http://www.slate.fr/tribune/64505/mariage-pour-tous-christine-boutin

Solieria Chordalis Tremens


















Vague à lame, mousse à raser, laisse tombée






































































































La loi de la pesanteur est dure,

mais c'est la loi !
















Sion sur l'Océan, 23 décembre 2012

samedi 22 décembre 2012

Amédée Bricolo, un clown drôle

"Recueil"
Comme dans tout spectacle réussi, toutes les générations y trouvent leur compte. C'est d'abord pour les enfants, mais personne ne s'ennuie. Son discours est délicieusement absurde et truffé de jeux de mots. Les enfants spectateurs participent activement...
Pour les programmateurs, il est facile à installer (techniquement) et comme il est seul, d'un coût abordable.















Avec ses spectacles, il a fait des virées de par le monde. Il a même été en Bretagne.

http://amedee.bricolo.pagesperso-orange.fr/new/voyage.html


C'est bien, mais c'est trop tard !




Les américains des U.S.A. possèdent 230 000 000 d'armes...

http://www.lemonde.fr/ameriques/video/2012/12/21/tuerie-de-newton-des-manifestants-perturbent-la-conference-de-la-nra_1809679_3222.html#xtor=RSS-3208

Ils ont des arguments massue !



Histoire de Sayo

J'ai lu ça avec intérêt, même si je ne rafole pas trop du dessin façon manga.

Le destin des japonais installés en Chine avant la seconde guerre mondiale. Lorsque le Japon a commencé à perdre cette guerre, ces civils ont subi toute la haine des autochtones qui avaient enduré une oppression terrible des pouvoirs japonais. Puis, il y eut les conquérants russes au Nord , pour lesquels ces colons japonais sont aussi des ennemis, et l'avancée des communistes chinois à l'Ouest. Au final, il y eut quelques évacuations réussies de ces civils vers le soleil levant, qu'ils retrouvent tout détruit par les bombes américaines...






Les Mayas sont des cons

Va encore falloir payer des impôts cette année.

Quant à la fin du monde, de leur monde, il y a des peuples qui l'ont vécu. Nombreux, dans les  Amériques. Pour retrouver le récit de l'écroulement inattendu de la civilisation aztèque, il y a un document unique, c'est le témoignage d'un des 50 premiers conquistadors, compagnons de Cortès entrés dans Mexico, leur magnifique Venise (elle était construite sur l'eau), capitale de l'empire. Cela se passe au début du XVIème, ce sont des récits qu'on a du mal à croire.
Evoquer cette lecture ici me donne l'envie d'y retourner, ce que je ferai certainement. Ce sera pour moi (l'unique ?) et heureuse conséquence de cette histoire apocalyptique...





La crise cardiaque

























Pour un accès plus rapide, je me permets de coller la vidéo suggérée par PE, le commentateur :







vendredi 21 décembre 2012

C'est court, mais ça cingle !


"Tous ces enfants sont des enfants de la France !"






 

jeudi 20 décembre 2012

Des mots bien de chez nous,

qui viennent de l'arabe...

aubergine (s.f.) (bot.) du castillan berenjena (es) venant de l'arabe باذنجان (ar) (bāδinjān) du persan بادنجان (fa) (bādinjān) : aubergine.

bardot (s.m. et adj.) de بردعة (ar) (bardaʿa) : bât. Âne bardot : mulet considéré comme animal de bât.

brêle (s.f.) de بغل (ar) (beghel) : mulet (sens transformé en français en passant par l'argot militaire).

caban (s.m.) de قباء (ar) (qabā) : capote ; vêtement de dessus.

couffin (s.m.) ou couffe (s.f.) de قفة (ar) (quffa) : grand panier.

douane (s.f.) de ديوان (ar) (dīwān) : bureau ; administration.

écarlate (s.m. et adj.) de أشكرلاط (ar) (aškarlāṭ) : tissu de couleur rouge vif (vient du persan).

farde, fardeau de فرد (ar) (fard) : balle contenant des marchandises, utilisée sur les animaux de bât.

goule (s.f.) de غول (ar) (ḡūl) : goule, vampire femelle qui dévore les cadavres dans les cimetières.

hasard, de زهر (ar) (zahr) : dé à jouer.

jupe (s.f.) de l'italien giubba (it) de l'arabe جبٌة (ar) (jubba) : veste du dessous.

laque (s.f.) de l'arabe لكّ (ar) (lakk) ou du persan لاك (fa) (lāk).


Choisis dans : http://fr.wiktionary.org/wiki/Annexe:Mots_fran%C3%A7ais_d%27origine_arabe#S

Multiscruting Clint























Là, pour dire d'où.

Pour une saine émulation,

bande de p'tits salopards !

GROS LOT – ERDF offre un iPad à l’agent qui ferme le plus de compteurs


http://bigbrowser.blog.lemonde.fr/2012/12/20/gros-lot-erdf-offre-un-ipad-a-lagent-qui-ferme-le-plus-de-compteurs/#xtor=RSS-3208


La complicité par les pieds (21)
























Crédit photo : Tom hauck

http://www.ballet.co.uk/magazines/yr_07/jun07/rr_rev_smuin_0507.htm

La page blanche

Une jeune fille se réveille comme d'un rêve, sur un banc de Paris. Elle ne sait pas ce qu'elle fait là, elle ne se souvient pas, elle ne se souvient de rien. On suit la reconstruction de son passé comme une enquête, jusqu'à une conclusion inattendue.
Ils se sont mis à deux pour enfanter ça, et ça valait la peine.







































Boulet (scénariste) et Pénélope Bagieu (dessineuse)

Crédit photo :
http://bd.leprogresblogs.fr/sport/

lundi 17 décembre 2012

Message sublibidinal

























Ah bon ? Mais pourquoi, s'il vous plaît ?

Réponse là.

dimanche 16 décembre 2012

En ce jour de défense du mariage gay, quelques mises au point de Didier Eribon

Quelques rappels historiques et des considérations valables, 

qui rappellent la position de "Causette" :

 

 HOMOPHOBE"

Entretien paru sur le site du journal en ligne Médiapart, le 14 décembre 2012.



- Dimanche 16 décembre, une grande manifestation est organisée à Paris pour l'égalité des droits. En face, les « anti » mariage mobilisent efficacement et entendent déjà faire du 13 janvier prochain une démonstration de force. Les partisans du mariage pour tous sont-ils assez mobilisés ?

- Je participerai à cette manifestation. De nombreuses associations y appellent, et pas seulement les organismes institutionnels ou les instances de la gauche officielle. Cela dit, je conçois qu’il ne soit pas facile de mobiliser les foules au milieu du mois de décembre pour une revendication qui peut paraître importante mais guère enthousiasmante. Il me semble pourtant que c’est une bataille plus centrale qu’il n’y paraît. S’y articulent de très nombreuses questions et perspectives pour le présent mais aussi le futur de la société dans laquelle nous vivons. Comme disait Foucault, nous ne devons pas seulement nous défendre, mais aussi nous affirmer. Et c’est ce qui est en jeu ici : d’abord,  nous défendre contre l’hystérie réactionnaire qui se déchaîne depuis trois mois, et qui va continuer de se déchaîner. Mais, surtout, affirmer collectivement quelque chose de neuf, quelque chose à venir : l’invention de nouvelles possibilités, de nouvelles pensées, de nouvelles formes sociales, de nouveaux modes de vie…. 

- Une question, simple, mais que beaucoup se posent : pourquoi le mariage ? D'ou vient cette revendication dans l'histoire dure du mouvement lesbien, gay bi et trans- (LGBT) ?

- On pourrait remonter loin dans le temps : Karl-Heinrich Ulrichs, le premier avocat de la cause gay, au milieu du XIXe siècle, évoquait déjà le droit au mariage pour les couples de même sexe ! C’est donc une aspiration très ancienne. Mais pour s’en tenir à l’époque contemporaine, on peut désigner deux grands axes. Le premier, c’est l’épidémie du sida : l’absence de reconnaissance juridique des couples produisait des situations affreuses, où l’on voyait la famille du malade interdire l’accès à la chambre d’hôpital à son compagnon, empêcher celui-ci de venir aux obsèques, le chasser de l’appartement occupé en commun etc. Les acteurs de la lutte contre le sida ont vite pris la mesure politique de ces drames intimes et ont intégré dans leurs combats la nécessaire instauration d’une telle reconnaissance. Le second, c’est ce qu’on a appelé le « gay babyboom » et surtout le « lesbian babyboom » des années 1990. A partir du moment où il y avait des enfants, des problèmes nouveaux se posaient… Et surtout, il devenait impératif de contester aux tenants du discours dominant le monopole de la parole : qui est qualifié pour définir ce qu’est un couple, une famille ? Qui a le droit d’avoir des droits ? Cette contestation est devenue déterminante à la fois pour des raisons qui touchent à la vie quotidienne et pour des raisons politiques profondes d’affrontement avec les tenants de la norme et de l’exclusion. A ceux qui se demandent : pourquoi les gays et les lesbiennes réclament-ils le droit au mariage ? la réponse est simple : parce qu’ils ne l’ont pas. 

- La France débat du mariage pour tous depuis la fin de l'été. On entend beaucoup les opposants à cette réforme. Vous qui vous êtes   longuement interrogé sur la question de l' «injure » faite aux homosexuels, comment qualifieriez-vous le climat actuel ?

- Quand la question a commencé à surgir, en septembre, j’ai fait une erreur d’analyse : j’ai pensé que le débat avait déjà eu lieu depuis quinze ans. J'ai pensé que j’avais dit ou écrit tout ce que j’avais à dire ou à écrire. Je suis donc resté un peu en retrait. Et puis j’ai vu à nouveau proliférer les invectives les plus ahurissantes, avec ces rassemblements et défilés de tous les défenseurs de l’ordre établi, le réveil des -fantasmes les plus absurdes, les dénonciations les plus abjectes… 

- Dans le discours des opposants, certaines images, certains arguments reviennent en boucle : le lien éventuel entre mariage/adoption et la pédophilie ou la zoophilie, l'interdit de l'inceste qui volerait en éclat, l'idée selon laquelle l'ordre naturel («un papa, une maman») sera bouleversé...Cela vous étonne ?

- Non, pas vraiment. Je constate au contraire une étonnante stabilité du discours homophobe puisque ce sont les mêmes termes que ceux que l’on entendait déjà à la fin des années 1990 à propos du Pacs ou bien en 2004 quand Noël Mamère a célébré à Bègles un mariage entre deux hommes. Les énoncés les plus répugnants sont hélas aussi les plus prévisibles : on assiste en réalité à un déplacement sur le couple homosexuel et les familles homoparentales de la pathologisation qui frappait autrefois les individus dits « déviants ». Si on a parfois l‘impression en ce moment de se retrouver transportés plus d’un siècle en arrière, à l’époque du procès d’Oscar Wilde, c’est parce que le couple homosexuel porte aujourd’hui le poids des mêmes condamnations : étant « contre-nature », il contiendrait donc tous les maux et tous les dangers possibles, imaginables et mêmes inimaginables… 

- Sauf qu'à la différence du Pacs, de nombreux opposants au mariage refusent aujourd'hui vigoureusement d'être qualifiés d'homophobes. Frigide Barjot, la médiatique égérie du mouvement des anti-mariage, arbore même en permanence un blouson portant le signe d'un célèbre bar gay de Paris...

- Mais ce n’est pas différent ! C’est presque pire. Cette hostilité froide et apparemment raisonnable n’est qu’un des visages que se donne la passion haineuse. Vous n’allez peut-être pas me croire, mais ce que j’éprouve aujourd’hui, et peut-être plus fortement encore qu’au moment des débats sur le Pacs, c’est un sentiment où se mêlent non seulement le dégoût et la colère mais aussi un certain effroi… Chaque jour, en écoutant la radio, en ouvrant un journal, je me sens, comme des centaines de milliers d’autres avec moi j’imagine, stigmatisé, agressé, insulté dans ce que je suis. Dans Réflexions sur la question gay j’ai analysé le rôle constitutif de l’injure dans les vies gays et lesbiennes. Aujourd’hui, cette injure, qui est « toujours-déjà » omniprésente dans les périodes ordinaires, se trouve redoublée, démultipliée par ces proférations et ces cris dans lesquels il est difficile de ne pas percevoir une sorte de haine homophobe viscérale et  immémoriale. C’est comme si ces manifestations contre l’égalité des droits servaient à organiser le retour sur la scène publique de tout le refoulé homophobe. En fait, ce sont des anti-Gay Pride. 

- Au fond, peut-on être contre le mariage pour tous et ne pas être homophobe? 

- Si vous parlez de ceux qui s’opposent à la mise en œuvre de ces mesures d’égalité, je vous réponds sans hésiter : non. Etre contre, c’est être homophobe. Et je ne suis pas disposé à me laisser intimider par les phrases qui commencent par : « Ah ! si on ne peut plus être contre le mariage pour tous sans être accusés d’homophobie »…  Non, en effet, on ne peut plus ! Le terrorisme et la violence sont du côté de ceux qui prononcent ces phrases, puisque ce sont eux qui justifient le maintien de la discrimination. Cela ressemble à ces formules bien connues : « Je ne suis pas raciste mais… ».

- Cela dit, tous les homosexuels ne souhaitent pas se marier !

- Oh, certes ! Mais on peut être pour le droit au mariage sans avoir envie de se marier soi-même. Cela n’a rien à voir ! On peut même se battre pour des droits par lesquels on n‘est pas directement concerné. Je sais qu’il y a aussi un autre argument, fort différent de celui-ci d’ailleurs, et qui consiste à dire, pour s’opposer à cette revendication, que l’on connaît des gays  qui sont contre le mariage. Ce n’est pas un argument sérieux : il y avait aussi des femmes contre le droit de vote des femmes, des femmes contre le droit à l’avortement et à la contraception.... Et alors ?  Aurait-il fallu pour cette raison renoncer à réclamer et imposer ces droits ? 

- Mais il y aussi des gens qui critiquent le mariage d’un point de vue qui se veut subversif, et qui y voient du conformisme, ou ou la reproduction d’un modèle hétéronormé.

- Oui, je ne l’ignore pas !!! Et je peux parfaitement  – même si c’est parfois difficile – engager la discussion avec ceux qui se situent comme moi dans le champ de la pensée critique ou radicale et qui entendent interroger la revendication en ce qu’elle laisserait ou renverrait dans l’ombre d’autres manières de vivre l’homosexualité, d’autres identités, d’autres représentations de soi…. Je trouve , malgré tout, assez ridicule d’avancer, comme le font certains militants ou intellectuels  qui croient que des slogans simplistes de ce genre suffisent à leur donner un brevet de subversion, que le mariage pour tous aurait partie liée avec le capitalisme, le nationalisme ou le colonialisme, etc. En même temps il est nécessaire d’être attentifs, en effet, à ce que nous disent certaines voix qui s’élèvent à côté de nous ou parmi nous. Aucun mouvement ne peut poser tous les problèmes à la fois mais cela ne doit pas nous conduire à nous désintéresser des problèmes que d’autres posent, parfois à la croisée, à l’intersection de ceux que nous posons à un moment donné. Et au lieu de chercher à opposer les mouvements, il serait plus utile et plus fécond d’essayer de voir quelles sont les dynamiques qu’ils enclenchent, les articulations qui peuvent contribuer à la lutte contre différentes formes de discrimination. J’ai signé la semaine dernière un appel pour le droit de vote des étrangers, cette semaine un appel pour soutenir manifestation du 16 pour l’égalité des droits. A mes yeux, ces deux démarches ne sont pas juxtaposées et extérieures l’une à l’autre. Ce sont des gestes qui se rejoignent. 

A ce sujet on entend d'ailleurs souvent, à gauche comme à droite, des gens qui pensent que cette revendication du mariage est une «diversion», que ce n'est pas la priorité en période de crise, que c'est une loi pour les « bobos »

- Oui oui, on connaît la chanson ! Au moment du Pacs, on entendait ça tous les jours : ce n’est pas prioritaire, en cette période de montée du chômage… Mais si l’on attend que les questions économiques soient résolues, on risque d’attendre longtemps. C’est d’ailleurs une bien vieille rhétorique : dans les années 1950 et 1960, le Parti communiste reléguait les luttes féministes au rang de « luttes secondaires ». Et dans les années 1930, le discours fascistoïde des personnalistes chrétiens fustigeait l’ « individualisme juridique » et mettait en avant le souci de la « communauté nationale ». Je sais qu’il se trouve toujours d’innombrables discours pour opposer les « luttes sociales » aux « luttes culturelles »,  la « critique sociale » à la « critique artiste », etc. avec les si déplaisants relents d’antiféminisme et d’homophobie qu’exhalent de tels propos. Mais qui décide des priorités ? Et ne peut-on avoir plusieurs priorités à la fois ? Ne peut-on mener plusieurs luttes à la fois ? Est-il possible d’opposer de manière aussi simpliste les questions économiques et les questions « sexuelles » : un couple de deux hommes ou de deux femmes au chômage et qui veut assurer une protection juridique, sociale et économique à ses enfants, on les range dans quelle catégorie ? Et deux femmes qui veulent se transmettre leurs biens ? Ou faire profiter l’une de la sécurité sociale de l’autre ? 

-En 1998, les députés PS s'étaient volatilisés au moment de soutenir le Pacs. Le PS est aujourd'hui favorable au mariage et à l'adoption pour les couples de même sexe, et même à l'insémination artificielle pour les femmes qui veulent en enfant. Le PS a donc évolué. Vous lui faites confiance cette fois ?

-Pas vraiment... Si nous en sommes là, c’est en grande partie à cause du Parti socialiste, de son conservatisme intellectuel. Les hiérarques socialistes n’ont cessé de dire, pendant des années, qu’ils/elles étaient contre le droit au mariage, à l’adoption, etc. Quand ils ont été contraints de voter le Pacs, ils/elles ont multiplié les déclarations pour garantir que ça ne déboucherait jamais sur le mariage, la filiation. Et ils ont décrété que le Pacs serait signé non pas en mairie, mais au tribunal d’instance. Quand Elisabeth Guigou et Martine Aubry ont demandé des rapports sur la rénovation du droit de la famille, elles les ont confiés à une sociologue de la revue Esprit et à une juriste catholique de droite). Guigou et Aubry savaient pertinemment qu’elles allaient verrouiller les portes, puisque ces expertes auto-proclamées de la vie des autres venaient de faire savoir avec un acharnement assez suspect qu’elles étaient hostiles à toute filiation homoparentale ! Ces deux idéologues ont évacué en quelques phrases aussi hautaines que brutalement discriminatoires tout ce qu’une réforme progressiste aurait dû envisager, au nom de la différence des sexes brandie comme le principe indépassable de la parenté légale et même comme le fondement de la culture humaine. Relisez ces rapports : ce sont de grands moments de violence institutionnelle envers les homosexuels. Au même moment, le rapport rédigé par le juriste Daniel Borrillo pour l’association Aides aurait pu servir de base plus intéressante pour repenser l’ensemble des problèmes, mais il n’a pas intéressé le moins du monde les ministres du gouvernement socialistes ! Ce sont ces mêmes dignitaires socialistes  qui, en 2004 encore, lors du mariage de Bègles, ont à nouveau déclaré leur hostilité à l’égalité des droits. Si nous avons dix de retard, la faute leur en incombe, et nous devons les tenir responsables de ce qui se passe en ce moment. Aujourd’hui encore, on voit bien la frilosité du gouvernement et d’une partie du PS, qui cherchent à restreindre la portée de la loi au lieu de l’ouvrir au maximum. Ce n’est pas parce qu’ils ont peur des réactions de « l’opinion » : c’est parce qu’ils sont eux-mêmes réticents, pour employer un euphémisme. Il suffit, pour s’en convaincre, d’entendre François Hollande parler de la « liberté de conscience » des maires, ou réaffirmer son refus d’intégrer la PMA  dans le projet de loi. C’est un parti de notables effrayés par la transformation sociale. Au nombre des choses qu’il faut réinventer, il y a évidemment la gauche. Il y a bien longtemps que celle qui est actuellement  au pouvoir ne mérite plus cette appellation. Il nous incombe par conséquent de refonder collectivement des processus politiques qui soient dignes de ce que peut signifier l’idée d’une pensée et d’une  pratique de gauche.   


Propos recueillis par Mathieu Magnaudeix

Didier Eribon est l'auteur de :