jeudi 31 août 2017

Que Dios nos perdone, de Rodrigo Sorogoyen

On aime bien les anti-héros, les flics tordus ou complètement à la dérive, incontrôlables et délirants. Cela fait des personnages fictionnels merveilleux. Ces deux-là sont ainsi, qui se permettent tellement tout qu'ils sont finalement jugés impropres au métier par leurs pairs.
Mais le fond de l'histoire, c'est la recherche d'un pervers qui s'attaque aux petites vieilles pour se venger de sa propre maman...
Un film bien charpenté qui intéressera le lecteur d'images jusqu'au bout.








My cousin Rachel, de Roger Michell


























Est-ce parce que je connaissais l'histoire (j'avais vu la version noir et blanc de 1952 et peut-être même lu le roman de Daphné Du Maurier, je ne me souviens plus), toujours est-il que j'ai trouvé ce film vraiment téléphoné quant à son dénouement, avec donc très peu de plaisir-suspense...
Ceci dit, il est très soigné filmiquement et dans les reconstitutions. Very British !

Mais je conseillerais plutôt la lecture du roman d'origine.
Et si vous aimez, vous serez plus troublés encore par Rebecca...





vendredi 25 août 2017

HP 1 - L'asile d'aliénés, de Lisa Mandel

Dans une réédition de 2016, par les éditions "L'association".

"Ma mère et mon beau-père ont été infirmiers en psychiatrie pendant 35 ans. Mon enfance a été bercée par tout un tas de récits abracadabrants, drôle et effrayants..."

Ainsi revivent par ces dessins expressifs et contrastés (on apprécie l'utilisation des seules couleurs orange et gris, dans des tons variés) ces épisodes touchants et révoltants, du quotidien des malades et du personnel des HP, de1968 à 1973.
L'occasion de soulever le voile occultant un des recoins sombres de la République (l'univers carcéral en est un autre), où la torture est réprouvée, mais où elle se pratiquait malgré tout sous couvert de soins psychiatriques qui souvent prenaient un caractère ultra-répressif.
Ce n'est cependant pas un témoignage à charge contre les personnels concernés, mais plutôt une évocation de l'enfer auquel ils devaient faire face avec plus ou moins d'humanité selon les personnes...

Une lecture édifiante, qui se poursuivra avec les tomes 2 et 3, puis un tome 4 à paraître qui évoquera la situation actuelle dans les HP.


























Le témoignage de l'auteure à la sortie du tome 2 :

http://next.liberation.fr/livres/2014/01/29/je-voulais-faire-entendre-la-parole-infirmiere_976381

vendredi 18 août 2017

Traité d'athéologie, de Michel Onfray

J'ai relu ce point historique et philosophique qui dresse le bilan des trois monothéismes qui imprègnent nos mentalités quelle que soit notre conviction religieuse.

L'occasion de rappeler que c'est une lecture indispensable, qui décille les yeux, et dresse une ardoise monstrueuse à ces entreprises d'enfumage des esprits... Cela permet à l'occasion d'argumenter avec des gens qui peuvent encore penser que le bilan des religions n'est pas si négatif, qu'il y a à prendre et à laisser...

D'où vient cette pulsion de mort qui pousse les chrétiens à imposer leur paix par la force dans le monde entier, et certains musulmans à mourir en entraînant le maximum de personnes innocentes ad patres ?

-> Lisez Onfray, c'est très éclairant contre les obscurantismes !
























Merci à Anne et Philippe qui m'avaient proposé cette lecture incontournable.


Par parenthèse, et en passant cette remarque : après sa monumentale contre-histoire de la philosophie, qui fut -quand même- utile, ne serait-ce que par les critiques et donc la réflexion qu'elle a suscitée, Onfray aurait dû se concentrer sur une question ou une période, ou un courant philosophique dont il aurait pu devenir le spécialiste. Au lieu de quoi il prétend dresser de nouveau une oeuvre de portée universelle, qui à mon humble avis n'a que très peu d'intérêt (On peut -ou non- suivre sa traque du "sublime" avec "Brève encyclopédie du Monde", sur France Culture, à 16h00, ce mois-ci).




dimanche 13 août 2017

Le vendredi 13 octobre 1907, un ketch quitta Cherbourg

et alla mouiller devant Brixham, à côté de Dartmouth en Angleterre. Or tout de suite un coup de vent violent se leva, brisant la première chaîne d'ancre, obligeant à lâcher la seconde et à s'engouffrer dans le petit port en grande catastrophe, se jetant sur la flottille des bateaux de pêche qui y étaient rangés, en en abîmant quelques-uns.

Ainsi commencent les aventures du J.B. Charcot, sous les ordres de Henry Rallier du Baty, avec 5 autres matelots dont Raymond, le frère du capitaine. C'est lui l'auteur de ce passionnant récit.

A l'époque -et de nos jours encore-, mettre la voile vers les îles Kerguelen sur un petit bateau de 20 mètres était une idée plus qu'audacieuse. Seuls les gros bâtiments de pêche hauturière s'aventuraient jusque là. Mais ils l'ont fait, entre Cherbourg et Melbourne en Australie, en passant par Rio, l'archipel Tristan Da Cunha, et les Kerguelen.

Sur le bateau d'Hervé, au mois de juillet, nous nous sommes lu à voix haute cette histoire vraie d'expédition maritime lointaine.

L'épisode qui a le plus retenu mon attention concerne l'escale de cet équipage à l'île Tristan Da Cunha, dans l'Atlantique sud. Car ils y trouvèrent une société indépendante du reste du monde, isolée et organisée sans chef, sans gouverneur, sans police, sans justice institutionnelle... Cependant, dans la pratique, l'un des habitants, Ripetto, un marin génois à l'origine, le seul qui sache lire et écrire, y avait un rôle de leader.
Henry Rallier du Baty écrit à propos de cet homme :
"Sa position est cependant fortuite et non le fruit de quelque droit coutumier, et à vrai dire, Tristan Da Cunha est une société comme en ont de tout temps rêvé les philosophes et que nos socialistes modernes appellent de leurs voeux. Il n'y a parmi eux ni haine, ni envie, ni malice. Tous contribuent au bien commun. Ils se rendent fraternellement service. Ils sont exempts des vices de la civilisation. Ils prient Dieu simplement. Ils sont proches de la nature, mais sans superstition panthéiste. La cupidité et l'usure leur sont étrangères. Il n'y a pas de distinction de classe, pas de riches ni de pauvres. En fait, sur ce rocher isolé au milieu de l'Atlantique, vit un peuple qui appartient plus à l'âge pastoral du monde qu'à notre époque moderne agitée, et qui sans théories, sans politique et sans lois écrites, a atteint l'état dénommé Age d'Or ou Millenium par les auteurs inspirés de toutes les époques, hantés par la décadence des villes surpeuplées."

Cette petite communauté comptait alors 17 familles pour 84 personnes.




















Le J.B. Charcot

















L'équipage (tous revenus sains et saufs de l'aventure)








jeudi 10 août 2017

Je me souviens (47)

d'un séjour en Angleterre alors que j'étais collégien. J'étais invité par une fille qui était ma correspondante comme on pouvait en avoir à cet âge-là (et à cette époque-là, est-ce que cela se fait encore ?)
J'avais expliqué que j'apprenais à jouer de la flûte à bec. Le père de la copine avait réagi plutôt négativement, disant je ne sais plus trop quoi, que c'était un instrument scolaire plutôt limité, ou quelque chose comme ça. Or j'avais avec moi une cassette (pas celle d'Harpagon, celle qui causait, quand on avait un lecteur approprié, avec deux petites roues autour desquelles s'enroulait une bande magnétique marron clair...) des danses du Terpsichore, de Praetorius. Je lui fis donc entendre (c'était dans sa voiture) et il admit que cela pouvait être bien plaisant.
Ces musiques m'accompagnent depuis fort longtemps. Aussi fus-je assez ravi lorsque Simon Hanks, notre bon maître de musique baroque, mit, cette année, quelques oeuvres de Praetorius au programme de nos sessions d'ensemble à la Visitation.



mercredi 9 août 2017

Valérian, de Luc Besson

Allez plutôt voir "La planète des singes - Suprématie", qui semble être une vraie réussite. Le film de Besson n'apporte rien de nouveau dans la planète science-fiction.


























La porte des secrets Et autres Contes libertins de Corée

Textes rassemblés et traduits par Kim Hyeong-Jun et Rodolphe Meidinger

Ils commencent presque tous en renvoyant le lecteur à une époque "où les tigres fumaient la pipe". De fait, ces récits coquins se situent dans un type de société traditionnelle coréenne où domine la morale confucéenne, ultra-rigoureuse où officiellement tout libertinage était fortement réprouvé.
Mais pas totalement absent, puisque ces récits sont des textes historiques, datés d'après les auteurs de l'époque du Joseon (1392 - 1910). La fourchette est large, mais on nous précise qu'ils dateraient vraisemblablement du XVIII ème siècle.
On y retrouve des métiers disparus, du marchand de sel à la Gisaeng, forme coréenne de la Geisha japonaise, des lettrés et même des esclaves. L'homme est souvent l'auteur des actions principales pour parvenir à conquérir les filles qu'il convoite. Mais les femmes ne sont pas en reste dans l'expression d'un désir le plus souvent assumé. La rouerie pour parvenir à ses fins est bien partagée.
La porte des secrets désigne le sexe féminin, le sexe masculin prenant des appellations variées, jusqu'à l'aiguille de l'acupuncteur, puisqu'un fourbe réussit à convaincre la fille qu'il aime qu'elle est malade et qu'il saurait la piquer avec son outil personnel pour la guérir... (le marchand de sel acupunteur)


Ici, la présentation du livre avec le premier conte :

http://www.atelierdescahiers.com/uploads/1/4/1/3/1413354/la_porte_des_secrets_extraits.pdf

Les illustrations sont de Marcela Dvorakova :



















Illustration pour "l'ascension de la petite servante"

















"La veuve enlevée"


















"Le poulain et le brin d'orge"

mardi 8 août 2017

Le nouveau nom d'Elena Ferrante

Encore plus savoureuse que l'opus I, cette suite de l'Amie prodigieuse imprègne le lecteur des langueurs et des tensions napolitaines d'antan, sans lasser, rivé qu'il est (le lecteur, donc) au destin des filles, complexement complices et rivales depuis leur tendre enfance.
Je me suis dit que beaucoup de lecteurs ont pu s'identifier facilement à la narratrice, à travers ses réussites et ses fragilités. Peut-être une des clés du succès. J'espère que le lecteur averti, dans sa lecture solitaire de cet article trop court, acquiesce quand même comme une bête en hochant ce qu'il veut, on n'est pas regardant.
Je m'en vais chercher la suite, de ce nonchalant pas, qui ne me caractérise nullement.



La pleine nuit

Quelques molécules sous les ponts
De hache et de zoo
On a pris des ris,
Dés lovés comme les perles d'os hâlés
On a tout déferlé sous les deux flots
Te souviens-tu des maléfices turquoise ?
Du front à l'intérieur de nos fors,
Tout fut borné, et tu étais lasse, au swing des chaloupes
Ton alcôve en tuera et moi je te pleuvrai
Jusqu'à ce que nos puits débordent
De sucs si familiers qui lissent tes berges folles
Et te percent à jour
En pleine nuit.