En 1885, le docteur Montalban publie sous ce titre un ouvrage sensé guider les jeunes mariés dans leurs ébats amoureux. Il est représentatif de la conception scientifique et médicale d’une sexualité bien menée en cette deuxième moitié du XIXème siècle.
Une bonne surprise : la jouissance sexuelle y est ouvertement exaltée. Cependant tout doit être sévèrement contrôlé : pour les femmes, l'importance des premiers rapports, l'hygiène des périodes de menstruation, la gravité du tournant que constitue la ménopause ; pour l'homme, tout est question de gestion spermatique, l'effort de l'orgasme étant considéré comme une grande perte d'énergie . On prétend à l'époque que l'émission de 30 grammes de sperme équivaut à la perte de 1200 grammes de sang...
A partir de 1850, l'Eglise porte son attention sur un nouveau fléau appelé « onanisme conjugal ». L'expression désigne toutes les manoeuvres qui, au sein du couple légitime, autorisent le plaisir sans qu'il y ait risque de grossesse. Les risques encourus sont la damnation des fidèles et la dépopulation de la patrie. Aux yeux des médecins, il risque surtout de dévitaliser les hommes et d' « énerver » les femmes.
Les médecins du XIXème siècle ne cessent de répéter qu'à l'état naturel, la femme a une puissance de jouissance répétitive qui dépasse de beaucoup celle de l'homme. Pierre Larousse note dans son dictionnaire qu'une femme équivaut dans ce domaine à deux hommes et demi. D'où l'angoisse réitérée d'une gestion spermatique rigoureuse. Il est généralement conseillé à un jeune homme vigoureux deux ou trois coïts hebdomadaires. Quand il frise la cinquantaine, on ne lui autorise plus qu'un rapport toutes les trois semaines . Certains praticiens admettent encore une activité aux cinquantenaires, mais au-delà, c'est l'abstinence pour tout le monde.
Longtemps a prévalu l'idée que la procréation ne pouvait s'opérer que dans le cas d'orgasme chez l'épouse. Mais en même temps, le rapport doit être vigoureux et bref. Au point que l'éjaculation précoce n'est pas un problème à l'époque, les médecins n'en parlent pas. Le temps moyen calculé pour un rapport (en 1906, dans la société bourgeoise suisse) est de 3 minutes.
Sous la monarchie de juillet (1830-1848), deux médecins découvrent le mécanisme de l'ovulation. Pas de chance pour les femmes, on comprend que ce qui compte, ce n'est pas le plaisir de l'épouse, mais la date du rapport. Il faudra attendre de longues décennies pour que le plaisir féminin revienne dans les pratiques conseillées. Et encore est-ce le plus souvent par crainte que la femme mal aimée ne recherche l'adultère...
D'après le chapitre "La petite Bible des jeunes époux", pp. 171-183
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