dimanche 11 août 2019

Lectures roumaines

Presque toutes roumaines.

J'ai commencé par Panaït Istrati. Un auteur du début du XXème siècle, qui est reconnu en Roumanie comme un témoin historique des révolutions qu'a connues le pays. Il a clairement pris le parti des petites gens, des victimes du rouleau compresseur de l'Histoire. En Roumanie, il n'y a qu'une librairie francophone, au 10 de la rue Biserica Amzei, à Bucarest. Son nom, Kyralina, est celui d'un roman d'Istrati.

Les chardons du Baragan, de Panaït Istrati

Dans des plaines asséchées du sud de la Roumanie, des enfants jouent à poursuivre des chardons, curieuses boules sèches qui roulent poussées par le vent. C'est une course folle qui les rend ivres de plaisir et les égare au loin… Ces enfants rêvent de contrées qui ne connaitraient pas la faim, et il est clair qu'ils fantasment sur les pays qu'ils découvriront au bout de leur course démente. Mais on est en 1907, et le roman d'Istrati, qui suit deux frères à la recherche d'une vie meilleure, mène le lecteur, après des péripéties dans les régions voisines, au plus fort de la révolte paysanne de cette année-là. Réprimée férocement par l'armée roumaine et les sbires des boyards, les grands propriétaires terriens.
Un excellent petit récit très vite lu…



























J'ai lu ensuite "Ma reine "de Jean-Baptiste Andréa
Beaucoup aimé cette histoire de grand gamin un peu méprisé par les siens, qui vit dans un coin paumé de la France du sud, avec ses parents dans une station-service décatie. Il va vivre une aventure hors du commun avec une fille rencontrée sur le plateau au-dessus de chez lui. Elle lui fera faire des découvertes somptueuses, et sa disparition soudaine plongera le gosse dans des tourments et des ruptures insondables… 
Un bon petit roman d'été, si vous voulez mon avis que j'ai.


























J'avais embarqué avec moi un Peter May qu'on m'avait indiqué, qui se passe sur l'île de Groix, que je connais un peu, y ayant séjourné plusieurs fois, et l'ayant abordé en bateau grâce à mon chum Hervé de Lorient. Je rappelle au lecteur non attentif que Peter May, c'est cet auteur écossais dont j'ai prétendu qu'on ne pouvait pas lâcher un de ses romans dès les premières pages attaquées...
Un peu déçu cependant, je n'ai pas retrouvé l'atmosphère oppressante des îles écossaises, ni la tension de ses autres bouquins. Mais bon, je l'ai lu très vite quand même, c'est rapidement prenant, et n'importe lequel d'entre vous (le premier venu par exemple) trouvera cela certainement formidable. Si vous ne connaissez pas cet auteur, prenez la trilogie écossaise qui commence par "L'île aux chasseurs d'oiseaux"...



























Je suis revenu ensuite à une autrice roumaine, Irina Teodorescu, trouvée en chemin, à la librairie Kyralina de Bucarest, donc. 
Chouette histoire rocambolesque, qui part d'un fait divers dramatique, la mort d'un brigand qui portera la poisse à toute la descendance du tueur, par une malédiction qui opère par delà les générations, et nous voilà emporté dans un tourbillon d'aventures, qui se terminent toutes dans des affres, et c'est assez cocasse tout ça, je vous le conseille pour rigoler un coup. 





Comme j'avais lu 4 bouquins en une semaine et que mon sac pesait déjà 23 kilos au départ (oui je garde tous les livres qui me plaisent, je les archive dans ma bibli perso, ok ?), je me suis dit qu'il fallait que je trouve quelque chose de plus conséquent qui me tienne plus longtemps, je suis tombé à Brasov sur un petit rayon de livres en français, duquel j'ai tiré "Une matinée perdue " de Gabriela Adamesteanu. Très bon choix, avec cette histoire de familles roumaines qui traversent le 20ème siècle et vivent les péripéties affreuses des mouvements de la grande histoire, celle qui broie les gens sans s'en rendre compte… Il y a beaucoup à apprendre sur l'histoire roumaine dans ces histoires assez emmêlées de la vie quotidienne de personnes de différentes conditions. Le récit n'est pas chronologique, on suit les fils d'histoires contemporaines de la période communiste pour revenir au début du siècle. Au final, c'est très édifiant sur le pays et ses mentalités. Mais c'était effectivement plus complexe à lire et cela m'a demandé plus de temps, l'objectif était atteint.
Il a été traduit en 10 langues, avec ses 500 pages, c'est certainement la plus consistante de mes lectures roumaines. 





Retour à Panaït Istrati avec un petit truc à 2 € (11 lei). Le récit autobiographique de ses années de jeunesse, en Grèce où il s'exile d'abord (venant des bords de la mer Noire, en Roumanie), travaillant dans une auberge où, bien qu'exploité, il réussit à se faire apprécier, puis en se faisant débarquer à Naples (il s'est caché en clandestin sur un paquebot), où là c'est franchement la galère, on est au tout début du XXème siècle, mais reprenant un autre navire de croisière, il parviendra à rejoindre la France, son objectif initial…
A  lire sans hésiter.



























Pour finir, j'ai trouvé dans une autre librairie, à Cluj, ce recueil de nouvelles remarquables : "Dépressions" de Herta Müller. La principale nouvelle qui a donné son titre à ce bouquin est saisissante, avec le témoignage de cette petite fille, dont le quotidien est cousu de violence.
Le synopsis de ce livre dit :

""Cinq heures et demie du matin. Le réveil sonne. Je me lève, enlève ma robe, la pose sur l’oreiller, mets mon pyjama, vais à la cuisine, monte dans la baignoire, saisis une serviette, lave mon visage, prends le peigne, me sèche avec, prends ma brosse à dents, me coiffe avec, prends l’éponge, me lave les dents avec." En dix-neuf nouvelles d’une poésie brutale et déroutante, Herta Müller dévoile, à travers le regard d’une petite fille, l’univers clos de la communauté germanophone de Roumanie dans les années 1970, dont le quotidien ne semble être qu’oppression, mensonge et violence."

Herta Müller a été prix Nobel de littérature en 2009. 



























Au final, je ne suis pas si mal tombé au gré de mes découvertes de voyage. Et pas seulement pour la littérature…


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